Je ne peux
que m’incliner devant l’affirmation suivante : Hotsoft est une association
qui s’arroge le droit de filmer la vie privée des étudiants.
Alors certes, l’on pourra
critiquer la raison d’exister d’une telle association, la condamner, crier à
son aspect pervers. Cependant, qu’on le
veuille ou non, Hotsoft reste une des associations les plus populaires de la
Toulouse Business School.
Certes, à la vue du JT, nous
apparaissons comme les victimes de ce système. Mais en réalité, nous en sommes
bien plus les acteurs. Et ce plaisir d’en avoir le premier rôle reflète le
désir profond et secret d’être porté un bref instant au centre de la scène.
Face à cette constatation, il y
a ceux d’un côté qui continuent à suivre le système ; et ceux qui se
rebellent.
Mais au fond, les rebelles ne
font-ils pas preuve d’hypocrisie en critiquant un système qu’ils
approuvent secrètement ?
Passer devant la caméra, le reflet d’un plaisir narcissique et pervers
Observez le
comportement des étudiants qui se font filmer pendant les soirées. N’y
retirent-ils pas un instant de plaisir jouissif ? Combien de couples sont
fiers de jouer les amants quelques
instants dans des émois quasi "passionnels" sous le prétexte d’être
sous le feu des projecteurs un moment?
Observons les couples (formés
exceptionnellement pour une soirée). On peut y déceler deux catégories :
Il y a ceux qui se font filmer
malgré eux. Alors face à la caméra, ils tourneront la tête pour cacher leur
visage, ou se montreront violents par quelques injections pour exprimer leur
mécontentement. En dépit de cela, les deux acteurs, conscients d’avoir été
placés un instant au centre de l’attention, se précipiteront au JT pour
vérifier qu’ils n’y apparaissent pas. Dans le cas contraire, ils se rebelleront
et dénonceront la violation de leur vie privée. Mais avec hypocrisie. Car en
réalité, en feignant les révoltés face à la diffusion de leurs petites élucubrations
amoureuses, ils espèrent bien secrètement être affichés publiquement.
Et il y a ceux qui prennent un
malin plaisir à se voir filmer. Ils se délectent alors d’un plaisir jouissif à
mettre leur vie privée sur le devant de la scène, dans un caractère purement
narcissique.
En effet, comment expliquer un
tel engouement devant le grand amphithéâtre lorsque le Journal Télévisé est
diffusé ? Comment justifier le fait que lorsque Hotsoft propose un
véritable chantage sur sa page Facebook en réclamant 2210 like pour diffuser le
JT du Swat, les étudiants s’inclinent et s’exécutent ? Il y a ici une
forme de perversion malsaine à aller voir son ami vomir aux sorties de la
boîte, son ennemie choper le mec qu’elle avait elle-même choper à la soirée
précédente, des élèves prononcer des phrases totalement incompréhensibles.
Alors oui, Hotsoft incarne le
monstre qui s’attaque à la vie privée des gens. Mais Hotsoft ne cessera pas
d’exister pour autant.
Car même si l’on essaie de se
donner bonne conscience en criant à l’irrespect, à la violation du droit à
l’image, les étudiants ne cesseront pas d’éprouver un plaisir malsain, dans une
tendance cathartique, face à la diffusion de ces images lors des JT.
Les rebelles feignent une indifférence qui ne les rend pourtant pas si
indifférents
Alors
certes, quelques rebelles dans cette masse voudront faire preuve de témérité en
affirmant qu’ils ne souhaitent pas être filmés. Ou du moins le feront-ils
croire. En effet, à la diffusion des JT, nous apparaissons comme de simples
étudiants qui reproduisons un schéma toujours identique : s’animer
devant une caméra, embrasser le premier ou la première venue, mettre à nu une
partie de son corps pour ne pas passer pour le peureux de l’école. Alors ceux
qui réfutent ce schéma veulent créer la différence en dénonçant Hotsoft. Ainsi,
ils cherchent à montrer que l’étudiant qui devient banal n’est pas celui qui
reste incognito au JT, mais est désormais celui qui y passe !
Si devant ses amis, on crie
haut et fort que l’on ne souhaite pas apparaître à l’écran, n’espérons-nous pas
secrètement défiler quelques instants aux yeux de tous ?
Ainsi, l’hypocrisie qui fait
qu’une telle association continue à exister provient de l’hypocrisie même des
étudiants qui jouent le double rôle d’acteurs et de spectateurs.
Je pense qu’au fond, même si nous
critiquons cette association au nom de
la violation du droit privé, nous éprouvons intérieurement le désir d’être un
instant placé sous le feu des projecteurs. La diffusion se révèlera pour
certains comme un court laps de temps, où ils apparaîtront de manière floue au second plan. Il sera pour d’autres un instant
de plaisanterie, où l’étudiant se verra balbutier
tel un enfant de deux ans qui apprend à parler. D’autres encore y verront un
instant de gloire, où ils prouveront à tous qu’ils ne sont pas des 'petit
joueurs'.
Puis il y aura les rebelles,
qui refuseront de se diriger au JT, préférant se préserver de passer devant de
telles obscénités. Mais au fond, ceux-là ne se mentent-ils pas à eux-mêmes en
faisant croire qu’ils sont insensibles au fait d’être au centre de la
scène ? Ils cherchent à créer leur propre instant de succès en ne se
dirigeant pas là où la masse afflue.
Car je crois que nous
ressentons tous le besoin, ne serait-ce qu’un bref instant, d’être précipités
au centre des attentions, d’une manière ou d’une autre, pour le meilleur ou
pour le pire.
Meggan MARCOS
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